Retour d'expérience été 2022
L'été dernier sur les hauteurs de la commune de Villar d’Arène dans les Hautes-Alpes, au cœur du parc national des Ecrins, la première édition de l’éco volontariat scientifique – Refuge de l’Alpe de Villar d’Arène a été organisée par le Réseau Nature Science Environnement en partenariat avec le dispositif « Refuges Sentinelles », le parc national des Ecrins et le club Alpin français de Briançon. Financé par le dispositif FEADER (Fonds Européen Agricole pour le Développement Rural), la région PACA et l’Université Grenoble Alpes avec l’objectif d’amplifier les interactions entre science et société.
Mais tout d'abord, qu'est-ce que le tourisme scientifique ?
A ce jour, il n'existe pas de définition unique du tourisme scientifique. Les définitions varient et diffèrent en fonction de la réalité du pays. Mais s'il y a une chose que les auteurs et les spécialistes du sujet affirment, « c'est que cette forme de tourisme valorise scientifiquement un patrimoine naturel ou culturel à travers des activités immersives »
Cette forme de tourisme participe donc à la création de connaissances collectives en associant touristes et chercheurs autour d’une mission et de son protocole scientifique. Il est possible d'affirmer que le tourisme scientifique est conçu comme une passerelle entre le monde de la science et celui du tourisme et motivé par l’acquisition et la diffusion de connaissances scientifiques afin de contribuer à une meilleure compréhension du territoire.
Etant donné que le territoire du PETR du Grand Briançonnais (Communauté de Commune du Briançonnais, Communauté de Commune du Pays des Ecrins et Communauté de Commune de Guillestrois-Queyras) est un territoire de montagne, de nombreux scientifiques viennent y mener des recherches autour des effet du changement climatique et des pratiques humaines sur les écosystèmes : biologie des adaptations et écologie évolutive, climat et fonctionnement des écosystèmes, dynamique des territoires de montagne parmi tant d'autres.
Le territoire du PETR du Grand Briançonnais est un environnement idéal pour le développement des pratiques touristiques à dimension scientifique. Ces collaborations entre scientifiques et citoyens, entre laboratoires, amateurs et associations, sont aujourd'hui en plein essor.
L'éco volontariat scientifique commence à se dessiner
En septembre 2021, le Réseau NSE s'est fixé comme objectif de valoriser cette thématique et de développer cette activité. Mais par où commencer ? avec quels laboratoires travailler ? quels chercheurs seront intéressés ? quels protocoles développer ? Afin de répondre à ces questions, le Réseau NSE s'est tourné vers son partenaire local, le parc national des Ecrins (PNE). Et qui mieux que le service scientifique du Parc, dirigé par Richard Bonet, pour répondre à ces sujets ?
Après plusieurs échanges avec Richard Bonet et Cédric Dentant (botaniste du PNE) l'un des dispositifs susceptibles d'être ouverts au grand public était le dispositif transdisciplinaire, collaboratif et multithématique « Refuges Sentinelles, refuges laboratoires de haute montagne » http://refuges-sentinelles.org amené entre autres par Philippe Bourdeau (PACTE), enseignant chercheur de l’Université Grenoble Alpes (UGA). Ce dispositif s’inscrit dans le cadre du programme "Sentinelles des Alpes et a été développé par le Labex ITTEM (Innovations et transitions dans les territoires de montagne) et le parc national des Écrins, en partenariat avec le CDP (Cross Disciplinary Project) Trajectoires-UGA et l’Agence Française de la Biodiversité,
« Les refuges de montagne constituent des observatoires privilégiés des effets croisés des changements environnementaux et culturels… Ils deviennent des laboratoires récréatifs dans lesquels des innovations de niche contribuent à l’émergence de modèles de développement, en phase avec les enjeux de diversification et de transition du tourisme de montagne… » Dispositif refuges sentinelles.
Le débriefing du dispositif de fin de saison 2021 a eu lieu en octobre. C’était l’occasion pour rencontrer l'ensemble des acteurs impliqués dans un tel dispositif : chercheurs, gardiens.es du refuge, AMM, guides, techniciens du parc, offices de tourisme, entre autres ainsi que présenter le Réseau NSE et ses activités. L'une de ces rencontres était avec Isabelle Boulangeant, chercheuse du Laboratoire Ecosystèmes et Sociétés En Montagne (LESSEM / INRAE) qui coordonne le suivi de la biodiversité d’altitude dans le dispositif « refuges sentinelles ».
Elle travaille avec d'autres collègues, après plusieurs mois, à l'élaboration de protocoles scientifiques simplifiés à destination des AMM, guides et gardiens de refuge. L'objectif est d’étudier un milieu très peu investigué, la haute montagne (> 2000 m) malgré des enjeux de connaissance accrus par les problématiques d’ordre climatiques tels que le réchauffement accéléré et le retrait glaciaire.
Suite aux échanges avec les différents acteurs impliqués, nous réalisons l’importance d’ouvrir ces protocoles au grand public (locaux et touristes). Avec la finalité, d’attirer des personnes qui par passion ou par conviction, participent aux collectes des données scientifiques, qui se révèle d’une utilité absolue pour les chercheurs et permet ainsi sensibiliser les participants à ce milieu naturel fragile.
A partir de là, l’éco volontariat scientifique commençait à prendre forme. Grace aux travaux de Pascal Mao, enseignant chercheur de l’UGA, spécialiste du sujet, l'éco volontariat peut être défini comme :
« …une participation plus active des touristes-volontaires dans le cadre d’un projet de recherche. Les volontaires deviennent des acteurs participant à la mise en œuvre du protocole scientifique, à la récolte des données, voire même au traitement et à la valorisation de données ».
Les protocoles scientifiques : biodiversité et sciences sociales et humaines (SSH)
Une activité touristique pour aborder les enjeux actuels liés au changement global et à la mondialisation des activités humaines, particulièrement ceux qui touchent la montagne, la biodiversité, la vulnérabilité des milieux et des territoires.
C'est dans cet esprit que le volet biodiversité d’altitude propose plusieurs protocoles simplifiés : biodiv'insectes, floraisons altitude, flore verticale, phénocolor et rencontre. Côté sciences sociales et humaines, un protocole d’observation axé sur 3 sujets principaux : la vie du refuge, les nouveaux publics en montagne et le bivouac ont été mises à disposition pour les éco volontaires. Ces protocoles ont été envisagés de les mettre en place à partir de l’été 2022.
Première étape, savoir si ces protocoles sont vraiment accessibles et ouverts au grand public. Pour cela, lors de la formation « botanique, tourisme scientifique et pratiques de la montagne » organisée par le PNE en partenariat avec le Réseau NSE en juin 2022 au refuge de la Chamoissiere à destination des AMM et guides de haute montagne, les protocoles ont été testés.
Le Réseau NSE a également organisé un atelier de co-construction de protocoles scientifiques le 21 juin avec des acteurs sociaux professionnels du territoire (associations et accompagnateurs en montagne) intéressés à participer aux réflexions sur ces protocoles. Le lieu de rdv : la maison du parc des Ecrins au col du Lautaret et le jardin du Lautaret.
Les retours ont été très positifs. Quelques ajustements et remarques nous ont permis de mettre au point ces protocoles pour l’été 2022.
Pour cette première année d'expérimentation, avec l'accord des acteurs impliqués, le refuge de l'Alpe de Villar d’Arène a été choisi. Tout d’abord pour son emplacement et sa facilité d'accès, mais aussi pour avoir été l'un des pionniers du dispositif «refuges sentinelles».
Une activité touristique pour aborder les enjeux actuels liés au changement global et à la mondialisation des activités humaines, particulièrement ceux qui touchent la montagne, la biodiversité, la vulnérabilité des milieux et des territoires. Un moment immersif pour se plonger sur les questionnements autour les conséquences des actions de l’Homme sur son environnement.
Communication de l'éco volontariat scientifique
La communication de l'éco volontariat scientifique a eu lieu dès que les protocoles ont été prêts (fin juin). Pendant le mois de juillet, plusieurs campagnes de communication numériques ont été réalisées en ciblant notamment le public local mais aussi en participant aux événements locaux tels que la fête du bois à Monêtier-Les-Bains et Floralies à Serre-Chevalier. Plusieurs publications dans des sites internet spécialisés comme Echosciences PACA ont était également faits.
Formation sur les protocoles scientifiques
La formation aux participants, notamment sur les protocoles et la présentation du dispositif a été assurée par Richard Bonet, responsable scientifique du PNE et Daniel Zambrano, chargé de mission du Réseau NSE respectivement.
Les éco-volontaires se sont rendus au refuge de l'Alpe de Villar d’Arène seuls. Une visite de l'équipe du Réseau NSE a été programmé chaque semaine afin de partager un moment d’échanges et pour faire une collecte des données ensemble en utilisant les protocoles prévus à cet effet.
En août, Sabine et André, les gardiens du refuge de l’Alpe de Villar d’Arène ont accueilli 3 participants pour une semaine chacun. Chaque participant a passé une semaine au refuge afin de collecter les données scientifiques en utilisant les protocoles développés (biodiversité et SSH) ainsi que pour participer activement aux activités inhérentes du refuge.
Une initiative originale autour des questionnements sur les conséquences des actions de l’Homme sur son écosystème qui permet d’appréhender plus de ce territoire montagneux d’une autre façon, laissant une plus grande place au développement de la culture scientifique partagé : science et société.
Pour aller plus loin :
site internet du Réseau Nature Science Environnement : https://www.tourismescientifique.fr/ecovolontariatscientifique
site internet du dispositif Refuges Sentinelles:
site internet du jardin du Lautaret :
site internet du Parc National des Ecrins :
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